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Rwanda- France : le rapport sur l’attentat contre l’avion de Habyarimana prêt

Rwanda- France : le rapport sur l’attentat contre l’avion de Habyarimana  prêt

Le rapport tant attendu des juges français Marc Trévidic et Nathalie Poux sur l’attentat qui a couté la vie à Juvénal Habryarimana, et son homologue burundais Cyprien Ntaryamira est prêt et aurait été remis aux autorités rwandaises ce dimanche 8 janvier, nous annonce le site ougandais ChimpReports.com.Le rapport devrait être publié ce mardi 10 janvier selon plusieurs sources dont le quotidien pro-gouvernemental rwandais Igihe.com.

Les deux juges français Marc Trévidic et Nathalie Poux, enquêtaient sur l’attentat du 6 avril 1994, depuis 2007, suite au retrait de Jean Louis Bruguière nommé Haut représentant de l’UE auprès des Etats-Unis dans le cadre du programme de lutte contre le terrorisme (Terrorism, Finance, Tracking Programme).  Le célèbre ancien juge anti terroriste Jean-Louis Bruguière a enquêté sur cet attentat depuis qui’ il a été saisi en 1998, à la suite de la plainte des parents des pilotes français de l’avion présidentiel. Les nouveaux juges français Trévidic et Poux chargés de l’affaire, ont repris toute l’enquête technique sur les tirs, avec un premier transport sur les lieux de l’attentat à Kigali en septembre dernier, en compagnie de nombreux experts.

Epave de l'avion abattu le 6 avril 1994, source: Gamma

Epave de l'avion abattu le 6 avril 1994, source: Gamma

Le juge Jean-Louis Bruguière, auquel Marc Trévidic et Nathalie Poux ont succédé en 2007, accusait Paul Kagame d’avoir planifié et mis en œuvre l’attentat avec son état-major. Selon Jean-Louis Bruguière, la décision d’attenter à la vie de Juvenal Habyarimana aurait été prise lors d’au moins trois réunions tenues fin 1993 et début 1994 au quartier général du haut-commandement militaire du FPR, à Mulindi. Le juge français suggère aussi que le chef du FPR avait prévu et instrumentalisé les massacres. Bruguière a estimé par ailleurs que Kagamé devrait être jugé par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Ce dernier avait par la suite délivré en novembre 2006, neuf mandats d’arrêt internationaux visant de hauts responsables rwandais dont l’actuel président, le général Paul Kagame. Les autorités en place à Kigali étaient ainsi désignées comme les responsables de l’attentat du 6 avril 1994 contre l’avion du président rwandais Habyarimana, qui a donné le signal du génocide. Plusieurs témoins rwandais ont été depuis réinterrogés par les juges Trévidic et Poux.

Le soir du 6 avril 1994, l’avion transportant notamment le président Habyarimana et son homologue burundais Cyprien Ntaryamira avait été abattu en phase d’atterrissage à Kigali par un missile antiaérien. Cet attentat toujours mystérieux est considéré comme le signal déclencheur de l’un des plus grands génocides du XXe siècle, ayant fait quelques 800.000 morts, en l’espace de 100 jours. Le conflit inter ethnique déclenché par l’attentat avait également été le point de départ d’une déstabilisation régionale, qui à ce jour, a fait 6 à 8 millions de morts selon plusieurs sources, à majorité des congolais.
Deux thèses s’affrontent dans les enquêtes: la première qui est celle du juge Bruguière, aussi partagée par plusieurs ex proches de Paul Kagame, met en cause l’ex-rébellion tutsi du Front patriotique rwandais (FPR) de Paul Kagame, actuellement au pouvoir. La seconde, avancée notamment par le régime de Kigali, impute l’attentat aux « extrémistes Hutu  » des Forces armées rwandaises qui auraient voulu se débarrasser du président Habyarimana, jugé trop modéré ».
Le 1er octobre 2011, Théogène Rudasingwa, ancien secrétaire général du FPR, le parti de Paul Kagamé, ancien ambassadeur du Rwanda aux Etats-Unis et ancien directeur de cabinet du Président Kagame, a enfoncé le couteau dans la plaie en accusant le président rwandais d’être le commanditaire de l’attentat aux micros de RFI et BBC.

Plusieurs personnes, ayant été membres du 1er gouvernement mis en place par le FPR à l’issue de sa victoire militaire de juillet 1994, comme Jean-Marie Vianney Ndagijimana , ex chef de la diplomatie rwandaise exilé aujourd’hui en France, et Twagiramungu Faustin, ex premier ministre, ont maintes fois pointé du doigt Paul Kagame comme responsable de l’attentat, cependant, l’accusation de Théogène Rudasingwa est accueilli avec beaucoup plus d’ intérêt, car venant d’ un ex collaborateur membre du cercle très restreint autour de Paul Kagame. «  «En 1994, Paul Kagame m’a personnellement confié qu’il a été le responsable des ordres donnés, de la mise en place du plan et de l’exécution de ce plan. A cette époque, j’étais le secrétaire général des Forces patriotiques du Rwanda (le parti de Paul Kagame) et je faisais aussi parti de l’armée rebelle, donc je travaillais dans l’entourage direct de Paul Kagamé.  » a indiqué M. Rudasingwa sur la RFI. L’ex-bras droit de Kagame admet encore avoir été au premier rang comme beaucoup d’autres au sein de la direction du FPR, de ceux qui étaient chargés de vendre « un récit mensonger avec enthousiasme en particulier aux étrangers qui pour la plupart l’ont cru« , alors même qu’il savait « que Kagame était l’auteur de ce crime« .

« Pendant longtemps, j’ai été l’un de ceux qui ont dit des mensonges et ont affirmé que c’est quelqu’un d’autre qui est le responsable de ce crash. Mais à présent que Paul Kagamé entraine le pays dans des situations dangereuses, je me dis qu’en révélant la vérité, cela peut servir à la réconciliation du pays. Cela peut être un exemple, pour la prévention d’éventuelles violences dans le pays. » A –t-il ajouté.

Dans le cadre de l’enquête sur cet attentat du 6 avril 1994 contre l’avion présidentiel, les juges français Nathalie Poux et Marc Trévidic se sont rendus à Bujumbura du 5 au 15 décembre 2010. A cette occasion, ils ont entendu six des « suspects », tous proches de Paul Kagame, il s’ agit de James Kabarebe, Sam Kanyamera, Charles Kayonga, Jackson Nziza, Frank Nziza et Jacob Tumwine, visés par des mandats d’arrêt internationaux délivrés par le juge Bruguière en 2006, ces personnes sont poursuivies pour « complicité d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste ».
Ce rendez-vous judiciaire au Burundi a permis d’éviter aux suspects une arrestation qui aurait été, selon la procédure, automatique s’ils étaient venus en Europe. En contrepartie, les mandats d’arrêt délivrés en 2006 par la France et qui avaient provoqué la rupture des relations diplomatiques entre Paris et Kigali ont été levés. Les suspects resteront poursuivis, mais retrouvent leur liberté de mouvement.
Les détails du rapport qui aurait été remis aux autorités rwandaises ce dimanche, devraient être publiés ce mardi 10 janvier. Le contenu de ce rapport est déterminant car l’attentat contre Habyarimana fait aujourd’hui l’unanimité comme étant l’énorme étincelle qui a mis le feu aux poudres au Rwanda et à l’origine de la déstabilisation régionale. Ce qui implique donc que son élucidation peut jeter tout l’éclairage que le monde attend sur les vrais responsables du détonateur qui a mis en marche les massacres au Rwanda en 1994.
Ce rapport pourra mettre le FPR de Paul Kagame en mauvaise posture, s’il s’avère que ce mouvement est responsable de l’attentat, puisque Kagame et son gouvernement n’ont cessé d’imputer cet attentat aux « extrémistes hutu » « qui se sauraient débarrassés de Habyarimana pour mettre en exécution le génocide préparé de longue date ». Rappelons que Kagame et quarante de ses proches sont également visés par la justice espagnole, qui a lancé un mandat d’arrêt en février 2008 contre ces officiers, les accusant de génocide et crimes de guerre au Rwanda. A l’origine des mandats d’arrêt espagnols, la mort de neuf ressortissants espagnols massacrés dans le nord du Rwanda en janvier 1997.Il existe aussi, selon la justice espagnole, suffisamment de preuves contre l’actuel président rwandais Paul Kagame pour l’inculper pour crimes de guerre. Toutefois il ne peut être poursuivi en raison de l’immunité accordée aux chefs d’Etat. 
Jean Mitari
Jambonews.net

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