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ONU: vives réactions après l’élection du Rwanda au Conseil de sécurité

ONU: vives réactions après l’élection du Rwanda au Conseil de sécurité

L’élection du jeudi 18 octobre à New York du Rwanda en tant que membre non-permanent du Conseil de sécurité pour les deux prochaines années a suscité de vives protestations dont les plus  virulentes viennent de son voisin congolais et de l’ONG international Human Rights Watch. Ces réactions sont dues à l’appui que le régime de Kigali continue d’apporter à la rébellion du M23 (Mouvement du 23 mars) qui sévit à l’Est de la RDC et y commet des atrocités inqualifiables. 

Didier Reynders et Augustin Matata Ponyo source: 7sur7.be

Didier Reynders et Augustin Matata Ponyo source: 7sur7.be


Cette élection du Rwanda au Conseil de sécurité, avec 4 autres pays (l’Argentine, l’Australie, le Luxembourg et la Corée du Sud), comme membre non-permanent du Conseil de sécurité des Nations Unies pour un mandat de 2 ans ne cesse de susciter le débat. Le Rwanda a réussi à obtenir la majorité des deux-tiers à l’Assemblée générale de l’ONU, requise pour obtenir un siège de membre non permanent au conseil de sécurité, et ce malgré de nombreux rapports qui accusent Kigali de soutenir activement les rebelles congolais du M23 à l’Est de la RDC.
Le Rwanda était le seul pays à se porter candidat au siège à pourvoir au sein du groupe africain, et a été élu dès le premier tour avec 148 voix, et remplacera l’Afrique du Sud dont le mandat expirera le 31 décembre 2012. L’élection au Conseil de Sécurité d’un pays accusé d’implication dans une guerre sanglante à l’Est du Congo a suscité pas mal d’interrogations sur l’image des Nations Unies. D’ailleurs dans une déclaration publiée vendredi 19 octobre,  le Conseil de sécurité a condamné fermement  « tout appui extérieur » apporté au M23 par des « pays voisins », sans citer expressément le Rwanda et l’Ouganda, et a exigé que ces ingérences cessent sous peine de sanctions.  « Des sanctions ciblées » contre les dirigeants du M23 et « ceux qui violent les mesures d’embargo sur les armes ».  « Des sanctions ciblées contre tous les responsables des exactions commises dans l’Est de la RDC » par le Conseil de Sécurité, c’est aussi le souhait  que des chefs d’Etat et de gouvernement de la Francophonie ont exprimé  lors de leur réunion à Kinshasa les 13 et 14 octobre dernier.
Opposition de la RDC à l’élection du Rwanda
Juste avant le vote, la délégation congolaise à l’ONU avait soulevé  sans succès  l’objection selon laquelle « le Rwanda n’est pas digne de siéger au Conseil en raison de son rôle déstabilisateur en République démocratique du Congo », l’accusant d’accueillir sur son territoire « des criminels de guerre agissant à l’Est de la RDC et qui sont recherchés par la justice internationale ». Aussi, la veille du vote, la représentante de la RDC,  Charlotte Malenga avait réclamé des sanctions internationales contre le Rwanda et l’Ouganda. « Il nous paraît tout à fait contradictoire qu’un pays, qui joue un rôle de déstabilisation de notre nation, qui est identifié comme un appui aux forces négatives et dont des personnes recherchées par la Cour pénale internationale (CPI), comme le général Bosco Ntaganda,  puisse accéder au Conseil de sécurité » , a pour sa part déclaré le chef du gouvernement congolais Augustin Matata Ponyo Mapon lors d’un point de presse conjoint avec le chef de la diplomatie belge pendant sa visite officielle en Belgique ce lundi le 22 octobre.
La Belgique s‘abstient
La Belgique, ancien colonisateur de la RDC tout comme du Rwanda,  s’est abstenue lors de l’élection du Rwanda au Conseil de sécurité de l’ONU en raison selon son ministre des Affaires étrangères, Didier Reynders, « du soutien apporté par Kigali à une rébellion active dans l’Est de la République démocratique du Congo. ».  « Nous nous sommes abstenus (…) pour marquer le coup » à la suite de l’apparition d’éléments sur l’implication d’un pays voisin dans cette mutinerie », a-t-il déclaré à l’issue d’un entretien à Bruxelles avec le Premier ministre congolais A. Matata Ponyo. « Voir un pays impliqué dans un dossier de ce point de vue siéger au Conseil de sécurité cela n’était évidemment pas notre priorité », a répété le chef de la diplomatie belge. Cette abstention belge Nations Unies a, en fin de compte, été comptabilisée comme une opposition à la candidature du Rwanda.
Human Rights Watch indigné
La  protestation la plus virulente suite à l’élection du Rwanda est venue  de  Human Rights Watch qui n’a cessé de dénoncer les atrocités perpétrées par le M23 avec l’aide du Rwanda à l’Est de la RDC à l’encontre de la population civile. « Le Rwanda n’est pas crédible pour occuper maintenant ce siège à cause de son soutien aux rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) en guerre contre la RDC, […] Nous estimons que c’est  un conflit d’intérêt d’avoir un pays à la table du Conseil de sécurité qui a ouvertement violé l’embargo sur les armes imposé par les Nations Unies et qui est en train de soutenir une rébellion dans un pays voisin et qui est responsable des crimes de guerre dirigés par Bosco Ntaganda recherché par la CPI », a déclaré à Radio Okapi Isa Sawyer, chercheuse à Human Rights Watch. « La  présence du Rwanda à ce siège aura un impact négatif  sur les  populations congolaises victimes de la guerre à l’Est de la RDC. Nous étions très déçus après l’élection du Rwanda comme membre non permanent du conseil de sécurité. Le Rwanda sera maintenant en mesure de bloquer les sanctions impliquant les officiels rwandais et d’autres initiatives dans la recherche de la paix en RDC. Nous pensons que ce sera une situation grave qui pourra avoir des conséquences négatives sur la population à l’Est de la RDC » a- ajouté Ida Sawyer, chercheuse et chargée de plaidoyer au sein de Human Rights Watch en RDC.
Kigali se dit mériter sa place au Conseil de Sécurité  
Quant à Kigali, il continue de nier son soutien aux rebelles de M23, et dit mériter de siéger au Conseil de sécurité. « Certains médias ont rapporté que le Rwanda entrait au Conseil de sécurité des Nations unies de façon controversée. Non, ce qui est controversé, c’est le rapport du groupe d’experts de l’ONU« , a déclaré le général Paul Kagame lors d’un discours devant des étudiants à Kigali le dimanche 21 octobre. Pour le général devenu  président, « Ce qui est douteux c’est le rapport de l’ONU, pas le Rwanda qui prend sa juste place aux Nations Unies. Ce siège que le Rwanda va occuper nous le méritons en tant que membre de la communauté internationale », a rapporté le site progouvernementale Igihe.com.
En vertu de la Charte des Nations Unies, le Conseil de Sécurité est responsable au premier chef du maintien de la paix et de la sécurité internationale. Il peut se réunir à tout moment, chaque fois que la paix est menacée. Aux termes de la Charte, tous les États Membres sont tenus d’exécuter ses décisions. Le Conseil a le pouvoir de prendre des mesures pour faire appliquer ses décisions, notamment des sanctions économiques et un embargo sur les armes.
En de rares occasions (ex : Cote d’ivoire, Libye), il a autorisé les États Membres à employer   tous les moyens nécessaires, y compris une action militaire, pour faire appliquer ses décisions.
Le Rwanda pourrait se servir de son siège comme monnaie d’échange
Si le  Rwanda au Conseil de sécurité aura une influence certes, son opposition à des décisions adoptées par le Conseil sera très limitée puisque  les décisions du Conseil de sécurité sont prises par un vote positif de neuf sur les 15 membres qui compose le Conseil de sécurité. Seuls les 5 membres permanents (Chine, France, Russie, Royaume-Uni et Etats-Unis) ont le droit d’émettre un vote négatif (droit de véto) et bloquer tout projet de résolution de cet organe. C’est ce que d’ailleurs la Russie et la Chine ont fait à trois reprises pour bloquer les résolutions du Conseil de sécurité concernant la Syrie, théâtre d’un conflit armé depuis plusieurs mois.
Le grand avantage que le Rwanda va tirer de cette présence est de se servir de cette assemblée comme tribune, pour continuer à réfuter les accusations sur le soutien qu’il apporte au M23. Kigali pourra aussi monnayer son vote dans un autre enjeu international, et s’attirer ainsi des faveurs, comme par exemple le rétablissement de son aide au développement qui a été suspendue par plusieurs de ses partenaires. Il ne serait donc pas étonnant que contre son vote dans les enjeux Syrien et Iranien, Kigali exige aux occidentaux de se montrer moins critiques sur le dossier M23 ou sur les violations répétées des droits de l’homme.
Jean Mitari
Jambonews.net

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