Selon plusieurs sources que nous pouvons confirmer, des hommes armés en habits civils ont entouré toute la nuit du 29 au 30 août le domicile de la famille Rwigara avant d’emmener Diane Rwigara et 4 autres membres de la famille. Pour l’heure, leur lieu de détention n’est toujours pas révélé.
C’est la tante de Diane Rwigara, Tabita Gwiza qui vit au Canada, qui a révélé l’information sur les ondes de Voice of America, mercredi 30 aout dans la matinée. Diane Rwigara, sa mère, Adeline, sa sœur, Anne ainsi que ses deux frères, Arioste et Aristote ont été emmenés par des forces de sécurité dans un lieu inconnu et sans mandat d’arrêt. Siméon Ndwaniye, l’oncle de l’opposante rwandaise l’a confirmé lors d’une interview avec la BBC : « des membres de la CID (Criminal Investigation Department ) se sont présentés dans la maison familiale et ont commencé à fouiller partout dans la maison y compris les documents privés, les ordinateurs, les téléphones, l’argent et tout autre chose qu’ils ont voulus prendre avant de les amener dans une place inconnu jusqu’à maintenant. » Pour le petit frère de Diane Rwigara, Aristide Rwigara, résidant aux Etat-Unis: «Il s’agit de réduire ma soeur au silence, parce qu’elle a dévoilé des choses et qu’elle n’a pas peur de dire ce qu’elle pense de tout le mal que le gouvernement rwandais fait».
Par l’intermédiaire du compte Twitter officiel de la police rwandaise, les autorités ont nié toute arrestation de la famille Rwigara et ont annoncé avoir procédé seulement à une perquisition, en relation avec deux affaires. La première serait l’accusation de la Commission électorale selon laquelle des fausses signatures d’appui ont été jointes au dossier de candidature de Diane Rwigara; la seconde toucherait à des impôts non payés par les sociétés d’Assinapol Rwigara (père de la Famille assassiné en mars 2015). Joint au téléphone par la RFI, Theos Badege, porte-parole de la police rwandaise a déclaré : « Je n’ai pas d’explication pour cela. Je peux juste vous confirmer que nous avons fouillé son domicile et que, dans le cadre de l’enquête des objets qui pourraient constituer des preuves, peuvent être saisis comme des ordinateurs, des documents, même des téléphones peuvent être saisis. Mais elle n’a pas été arrêtée ; aucun des membres de sa famille n’a été arrêté. » Relancé par la journaliste de la RFI sur la raison pour laquelle, il n’y a toujours pas d’enquête lancé pour retrouver les membres de la famille Rwigara disparues, Badege a déclaré n’avoir reçu « aucune plainte disant que Diane Rwigara ou des membres de sa famille ont disparu, donc pourquoi ouvrir une enquête ? »
Les scandales se sont multipliés depuis l’annonce de sa candidature. Des images de l’opposante dénudée ont miraculeusement commencé à circuler sur Internet. Les premières attaques ont été juste après l’annonce de sa candidature le 3 mai 2017, puis les suivantes lors du lancement de son mouvement, People Salvation Movment – Itabaza, le 14 juillet. Pour les soutiens de Diane Rwigara, nul doute, c’est la DMI, les services de renseignement rwandais à la solde du FPR, qui serait à l’origine de ces montages photoshop ignobles. Après une interprétation hasardeuse des listes de signature pour la candidature à l’élection présidentielle et des explications douteuses de la part de la NEC (National Electoral Commission), Diane Rwigara fut exclue de la course au scrutin présidentiel. Le prétexte invoqué est qu’elle aurait falsifié 26 signatures parmi ses soutiens et de compter parmi eux trois personnes décédées.
Les messages et marques d’inquiétudes se sont multipliés sur les réseaux sociaux de la part des proches, amis et soutient de Diane Rwigara, depuis l’annonce de la disparition inexpliquée de l’opposante et de trois membres de sa famille. En interview avec un journaliste de l’AFRIQUE MAGAZINE en juillet 2017, Diane RWIGARA avait déclarée : « Je crains plus pour la sécurité de mes proches. Au Rwanda, si l’on décide de se lancer dans la politique ou de s’exprimer, les conséquences sont subies par votre entourage. On peut être privé de son travail, faire faillite, se retrouver en prison ou perdre la vie. »
Comme un symbole, l’enlèvement de Diane Rwigara et de sa famille survient le 30 aout, le jour qui a été désigné par l’ONU comme Journée internationale des victimes de disparition forcée. Cette journée a été instaurée pour attirer l’attention sur le sort des personnes emprisonnées contre leur gré dans de mauvaises conditions et dans des lieux inconnus de leurs familles et/ou de leurs représentants légaux. La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées a été signée à New York, 20 décembre 2006. 93 états sont signataires, et 43 Parties à la convention. Cependant, le Rwanda refuse toujours d’y adhérer. « Les disparitions forcées ont souvent servi de stratégie pour faire régner la terreur dans une société », rappelle l’ONU. Le sentiment d’insécurité résultant de cette pratique ne se limite pas aux proches de la personne disparue mais touche aussi la communauté et l’ensemble de la société. Au Rwanda, ceci est une pratique courante. Un nombre croissant de personnes ont été victimes de disparitions forcées ou ont été officiellement portées disparues au Rwanda depuis 2015 et le début de la campagne pour le changement de constitution devant permettre à Paul Kagame de se maintenir indéfiniment au pouvoir. Plusieurs cas ont été largement documentés ; tels que Illuminé Iragena, membre du FDU-Inkingi, un parti d’opposition, qui n’a jamais été retrouvée. Rappelons également les cas des corps retrouvés dans le lac Rweru faisant suite à une série de disparitions dans les villages de personnes critiques au pouvoir.
TURINIMANA GATSINZI Egide
www.jambonews.net
Envie de proposer un article pour publication sur jambonews.net? Plus d’infos ici